Axe 1 - Environnement et Paysage

La dynamique des paysages est plus que jamais le résultat de l’interaction/hybridation des activités humaines et des facteurs environnementaux au 1er rang desquels se trouve le climat. La transformation et la mutation des paysages relèvent des dynamiques des territoires, sous tendues par celles sociétales sur différentes temporalités, le temps long et celui plus court induit par le changement des pratiques, les aménagements anthropiques et les effets du changement climatique (en particulier sur le littoral et en haute montagne). Aujourd’hui, les évolutions climatiques sont au cœur des enjeux environnementaux. Si les marqueurs de l’action anthropique sont aisément lisibles dans la transformation des paysages (tendance à l’uniformisation des paysages culturaux et urbains, fragmentation des milieux naturels et recul des espaces boisés ou humides, artificialisation des sols, altérations des services écosystémiques, etc.), l’impact du changement global induit par le changement climatique sur l’environnement et les paysages se traduit de manière contrastée avec  : des phénomènes extrêmes dévastateurs (ouragans, incendies géants, inondations de grande ampleur) qui transforment fortement les milieux et des phénomènes progressifs : sècheresses sévères et prolongées avec disparition de zones humides, dépérissement et modification de la végétation plus ou moins irréversibles. Interroger le lien Rural urbain par le prisme du Paysage, c’est interroger et démêler la part des sociétés et celle des facteurs naturels (environnementaux) dans sa structure, sa dynamique et sa place dans les trajectoires territoriales. Dans une démarche plus opérationnelle, c’est réfléchir à l’échelle des territoires aux dynamiques environnementales porteuses de plus de vulnérabilité et de risques, à l’imbrication des facteurs anthropiques et naturels dans les formes d’évolutions paysagères. C’est aussi travailler sur le statut et la fonction du/des paysage/s, sur les éléments environnementaux à préserver ou atténuer pour maintenir une diversité paysagère sources d’aménités et prévenir la survenue de catastrophes.

Axe 1.1 Biodiversité et Nature

Les membres du laboratoire Ruralités entendent interroger la manière dont les sociétés contemporaines majoritairement citadines projettent sur les campagnes, la nature et l’environnement de nouvelles grilles de valeurs, un nouveau regard, une nouvelle esthétique, un nouvel idéal (citadin) qui produisent de nouvelles infrastructures, de nouveaux équipements et de nouveaux investissements pour promouvoir de nouvelles logiques marchandes et de consommation (aliments bio, circuits courts, bien-être animal…), de nouveaux usages touristiques, récréatifs, hygiénistes et patrimoniaux (tourisme vert, gites à la ferme, écomusées, parcours de santé, sports de plein air…) ainsi que de nouveaux aménagements de la nature (parcs et réserves naturels, réserves de biodiversité, sentiers découvertes, reboisement et « ensauvagement » des paysages, réintroduction des grands prédateurs…). En définitive, la culture citadine devenue démographiquement, économiquement et politiquement majoritaire sur bien des territoires au Nord comme au Sud serait-elle en passe de se « ruraliser » ?

Pour appréhender cette dimension biophysique des territoires, nous proposons également d’étudier les structures paysagères, entendues ici dans leur dimension matérielle, et leur évolution dans le temps. La requalification des liens entre espaces ruraux et espaces urbains se traduit en effet par des transformations paysagères (par exemple, les paysages associés à la transition alimentaire). Que nous disent ces transformations paysagères de l’évolution des systèmes sociaux qui les produisent ? Par ailleurs, ces dynamiques paysagères ont des incidences environnementales, par exemple en matière de biodiversité ou de gestion de l’eau, qui constituent un des objets de recherche du laboratoire.

Axe 1.2 Climat, eau et énergie

Dans le contexte planétaire de dégradation environnementale globale, le concept de transition est désormais largement exploré dans la recherche scientifique internationale et objet de politiques publiques multiniveaux et multithématiques en France. S’agissant plus spécifiquement de la crise climatique contemporaine, le domaine de la production/consommation d’énergie est particulièrement concerné au regard de son rôle majeur dans les émissions de gaz à effet de serre et de la pollution atmosphérique. A l’échelle locale, de nombreux territoires urbains et ruraux initient une transition énergétique, outil privilégié pour une décarbonation de la société.

Au gré de politiques publiques de plus en plus ambitieuses, il est intéressant de s’intéresser aux mécanismes institutionnels, décisionnels, techniques, participatifs, etc. qui permettent à la transition énergétique de s’inscrire dans les territoires et d’articuler les espaces ruraux et urbains. Cette nouvelle politique énergétique se singularise-t-elle au regard de l’identité urbaine ou rurale des territoires ? La question de l’échelle de décision et d’action dans cette nouvelle gouvernance du monde de l’énergie est une piste d’investigation intéressante des relations entre territoires ruraux et territoires urbains. Entre compétition et coopération entre territoire, le champ des possibles est large, augurant de probables scenarii de développements territoriaux diversifiés. La gouvernance de l’énergie est susceptible de devenir l’un des piliers du développement local futur, et les territoires urbains et ruraux révèleront-ils peut-être des spécificités respectives.

Il s’agit aussi de s’intéresser aux ressources environnementales, en particulier autour des conflits d’usages de la ressource en eau, de la protection des périmètres de captage en eau potable, des zones humides, des questions d’irrigations liés aux grandes cultures, tout cela dans un contexte de changement climatique. L’analyse des dynamiques entre rural et urbain au prisme des processus de structuration d’acteurs pour intégrer l’eau dans les projets de territoires nous intéresse particulièrement. La gouvernance de l’eau dans les territoires est d’une brulante actualité, les mouvements citoyens plaident pour un statut de ressource ou bien commun des territoires et pour une approche territoriale et non plus sectorielle compte tenu des enjeux identifiés. Le débat sur l’irrigation agricole en particulier pour la production du maïs pointe le fait que si elle permet de s’affranchir des aléas météorologiques et d’avoir de bons rendements, le revers de la médaille est représenté par les externalités et les impacts négatifs pour les écosystèmes. La production française de maïs étant largement excédentaire et 40% environ est exportée, une partie des prélèvements d’eau sert donc au marché extérieur. À la différence des autres usages, l’eau prélevée pour l’irrigation n’est généralement pas restituée aux milieux aquatiques. La demande sociétale est de plus en plus en faveur d’une agriculture nourricière et en phase avec les besoins alimentaires des territoires locaux approvisionnés en circuits courts. Elle place donc l’eau au cœur des stratégies alimentaires locales ou territoriales liant l’urbain et le rural.

Axe 1.3 Services écosystémiques.

A RURALITES, nous posons l’hypothèse que les relations entre l’urbain et le rural peuvent aussi se lire et se comprendre par le prisme des services écosystémiques, c’est à dire des bienfaits que tirent les hommes des écosystèmes. Depuis la popularisation de cette notion en 2005 par le Millénium Ecosystem Assessment, la littérature scientifique est abondante sur la question. Les quatre services aujourd’hui reconnus, les services approvisionnement, socioculturels, de régulation et de support sont étudiés par différentes disciplines. L’originalité de l’approche de RURALITES est d’en faire un critère de discrimination ou de rapprochement entre les villes et les campagnes. Il s’agit par exemple de comprendre la ville par ses rapports à son couvert végétal (parcs, espaces agricoles, plan d’eau, forêt, etc.). On peut aussi s’intéresser au rôle et à la place de la diversité biologique dans la remédiation des différentes pollutions (agricoles, urbaines, etc.). La place de l’offre de nature dans l’attractivité des territoires (touristique, résidentielle, économique, etc.) rentre aussi dans cette thématique. Nous prendrons aussi en considération les disservices, comme les coûts (matériels et immatériels) de la biodiversité en ville ou encore les conflits issus du rapprochement entre les activités agricoles et les installations urbaines.

Les recherches porteront notamment sur les services écosystémiques rendus par l’agriculture, en lien avec les thématiques traitées dans l’axe 2 du laboratoire. Alors que cette dimension est de plus en plus souvent prise en compte dans les politiques publiques agricoles (développement des paiements pour services environnementaux, par exemple), comment l’agriculture peut-elle participer à la production de services écosystémiques ? Au contraire, quelles sont les conséquences environnementales des recompositions socio-spatiales des systèmes agricoles, en particulier dans les espaces ruraux de faible densité ?